samedi 26 mai 2012

Vendetta à la mexicaine...

Du noir, du très noir, du violent, du très violent... Voilà le menu du jour ! Un roman exigeant, aussi, du fait d'un style elliptique qui ne livre les pièces du puzzle que petit à petit, sans forcément recourir à la linéarité, qui mâche le travail du lecteur. Voilà quelque temps, en tout cas, qu'un roman noir ne m'avait pas à ce point bougé et on y trouve quelques scènes d'anthologie qui devraient, je pense, attirer l'oeil de quelques scénaristes et réalisateurs... Ce roman, c'est "Eden", d'Alain Claret, sorti chez Robert Laffont, livre reçu dans le cadre d'un partenariat avec LivrAddict et Robert Laffont (que je remercie beaucoup tous les deux, et mille excuses pour ce retard indépendant de ma volonté...). Un roman qui, malgré son titre, n'a rien de paradisiaque ; ce serait plutôt tout le contraire !


Couverture Eden


Non contents content d'avoir mis en coupe réglée la région du Mexique dont ils sont originaires, les hommes du cartel de Sinaloa ont débarqué en France. Avec un objectif clairement défini : faire main basse sur le marché de la drogue à Paris, d'abord, dans le reste du pays, sans doute, par la suite. Et ce, quitte à éliminer sans faire de quartier la concurrence...

Mais cet impitoyable cartel, qui ne recule devant aucune violence, a choisi notre pays pour une autre raison : remettre la main sur quelques milliards de dollars composant leur trésor de guerre. Des milliards, confiés à des hommes d'affaires peu regardants, qui se sont évaporés dans les mystérieux circuits financiers mondiaux, au gré de placement hasardeux...

Et celui que le cartel considère comme le responsable de ce fiasco, celui qui doit payer, dans tous les sens du terme, c'est... Eden. Un maillon de la chaîne, sans doute, mais une victime idéale et désignée...

En outre, ce "malheureux" Eden n'a pas que le cartel aux trousses... Il doit aussi redouter un duo peut-être plus terrible, peut-être plus impitoyable, sans doute plus intelligent et déterminé que tout le cartel réuni. Un duo féminin, Juana et Madeleine.

Juana est la fille illégitime d'un sénateur mexicain et d'une paysanne indienne, aussi pauvre qu'inculte. Le sénateur, lui, a des accointances très nettes avec le cartel de Sinaloa, et c'est même une partie de l'argent qui lui revient qui a disparu... Madeleine, elle, est française, d'une mystérieuse et envoûtante beauté, à la fois éthérée et désespérée, elle est devenue l'amante de Juana, son alter ego, même après que la mexicaine l'eut sauvée d'une tentative de suicide pourtant proche de réussir...

Ne croyez pas que Juana soit déterminée à retrouver Eden et les milliards pour rendre service à son cher papa... Non, ce serait même tout l'inverse, en fait. Si elle réussit à mettre la main sur Eden, c'est avec l'idée de se venger de ce père indigne qui l'a laissé dans sa fange et qu'elle tient pour responsable de la mort de sa mère. Quant à Madeleine, il y a bien longtemps qu'elle n'a plus rien à perdre dans cette vie qui ne l'intéresse plus vraiment...

Voilà pourquoi ces deux-là sont bien plus cruelles et redoutables que les hommes d'un cartel pourtant éclaboussé de litres de sang...

C'est dire si les jours d'Eden sont comptés... Et il sait bien qu'il a une énorme cible dans le dos, désormais.

A moins qu'il ne lui reste quelques amis, déterminés à le tirer de là, ce que Eden lui-même ne soupçonne pas. Oh, pas par charité, mais avec des idées pleines de dollars derrière la tête aussi...

Entre ces 3 parties qui vont tout mettre à feu et à sang, Eden est pris dans une nasse inextricable et accepte les choses presque avec fatalisme, on dirait. Mais ces rivalités mortelles retardent sans cesse l'échéance. Et, petit à petit, on se dit que Eden va peut-être se sortir de ce bien mauvais pas, sa sortie de secours étant un massacre général qui laisserait tout le monde sur le carreau... sauf lui...

Illusion, sans doute. Mais le cas Eden ne va, effectivement pas se régler aussi facilement !

Car Eden est une sorte de Roi dans un jeu d'échecs grandeur nature, monstrueux, et dont il ne maîtrise aucune des règles. Face à lui, celle qu'il appelle "la Dame" est en fait une Reine adverse aux motivations bien différentes de tous ceux qui se débattent dans ce "panier de crabes".

Claret choisit donc de nous proposer une narration elliptique, presque déstructurée, qui demande parfois des efforts au lecteur pour se situer. Le récit est dense, complexe mais passionnant et le fil conducteur, sans être le narrateur, est l'un des porte-flingues du cartel, un certain Manuel (évitez de lui dire : "oh, Manuel, tu descends ?", parce que descendre, c'est son job, justement...). Un assassin, sans scrupule, ou presque, que rien ne semble effrayer, ou presque.

Organisateur des basses oeuvres du cartel, il est l'homme de confiance d'Enrique, la tête du cartel en France. Et il obéit aux ordre avec zèle et efficacité... Jusqu'à sa rencontre avec Juana qui va changer beaucoup de choses... Car, loin d'être impressionnée par cette univers au combien machiste et viril, c'est elle qui va rapidement mener tout le monde à la baguette, agissant tant par la séduction que par une cruauté épouvantable.

Le tout, sur fond de religion. Enfin, de religions, devrais-je écrire, tant la foi de Juana, issue tout droit des cultes indigènes, primitive, lorgnant vers la magie, l'ensorcellement, va se heurter au catholicisme, bizarrement ancré dans tous les actes et les gestes des membres du cartel. Entre croyances et superstitions, l'une est transcendée, les autres, comme paralysés...

Munie de ce pouvoir ancestral, Juana va accomplir sa vengeance, lentement, avec une perversité et une délectation qui font froid dans le dos... Et ceux qu'elle n'éliminera pas, elle les tiendra par la peur...

Tout au long de ce roman, Claret nous offre des descriptions très réalistes et détaillées, très dures, très violentes des scènes d'action, mais il s'applique à mettre la même minutie à la description des lieux, qu'on se trouve au bas d'une cité de banlieue, sous le périph' avec les junkies, dans des hôtels plus ou moins minables de la capitale, dans un restaurant, jusque dans ses chambres froides...

Et cette qualité de description atteint son paroxysme dans une scène finale ultra-violente qui restera dans la mémoire des lecteurs, je suis prêt à y mettre ma main à couper... Je n'en dirai pas plus ici, évidemment, mais, cela, et bien d'autres aspects, m'ont fait pensé à Scarface, évidemment, sans doute l'idée qui vient le plus naturellement à l'esprit. Mais, on se croirait aussi par moment dans un film à la Tony Scott,; "True Romance", par exemple, l'humour en moins, parce qu'on rigole peu, en lisant "Eden", reconnaissons-le.

Et, puisqu'on est dans les rappels, les associations d'idée, j'ai aussi songé en lisant "Eden" à un roman d'Arturo Perez-Reverte, "la Reine du Sud", pour le côté femme mafieuse et impitoyable... Même si les destins des personnages n'ont pas grand rapport au-delà de ce point commun.

J'avais, même si je n'aime pas trop ça, entendu de bonnes, de très bonnes choses sur ce roman, d'un auteur que je ne connaissais pas, malgré une bibliographie déjà imposante (mea culpa !) et c'est ce qui m'a décidé à postuler sur ce partenariat. Pas une seconde, je ne regrette ce choix, "Eden" restera une lecture marquante, même si, je le redis, c'est un livre qui demande pas mal d'attention, qu'on ne lit pas d'une traite ou dans n'importe quel contexte.

Je le conseillerai à des lecteurs de romans noirs aguerris, car il faut quand même s'accrocher devant le déferlement de violences qu'on retrouve dans cette histoire... Je n'ai pas compté les victimes, c'est d'ailleurs impossible, mais quelle hécatombe ! Alors, âmes sensibles ou novices dans ce genre littéraire, revenez plus tard...

Les autres, eux, je le souhaite, passeront un très bon moment, comme moi, au fil des pages d'un roman qui, aussi étrangement que cela puisse paraître après ce que je vous ai raconté, et surtout après plus de 400 pages noires comme de la poix, s'achève sur une lueur au bout du tunnel... Un ouf de soulagement, l'espoir de se sortir sans trop de dommage d'un tel carnage.

Mais, l'heureux(se) élu(e) ne sera pas forcément celui ou celle que l'on imagine...


jeudi 17 mai 2012

"Sieh drinnen nach..."

Décidément, la période de la Seconde Guerre Mondiale et le thème, difficile, éprouvant, des secrets de famille qui perdurent de génération en génération pour bouleverser des vies durablement. Mais les deux sujets sont l'un et l'autre si vastes que cette émulsion peut être renouvelée régulièrement sans jamais prendre le même goût pour le lecteur. En voici un nouvel exemple, avec un roman qui, je pense, devrait, comme moi, vous mettre assez mal à l'aise. Et j'aime bien les livres qui désarçonnent le lecteur, l'obligent à quitter ses certitudes, à revoir son système de valeurs... Longtemps après avoir refermé "la vie contrariée de Louise", de Corinne Royer (paru aux éditions Héloïse d'Ormesson), cette histoire a nourri ma réflexion et j'ai partagé la douleur des deux personnages centraux (tandis que, il me faut le reconnaître, les autres personnages de la période contemporaine n'ont suscité qu'une profonde horripilation...).


Couverture La Vie contrariée de Louise


Comme son nom l'indique, James Nicholson est américain. Et longtemps, il s'est cru un américain à 100%. jusqu'au jour où son père, sur son lit de mort, lui apprend que la grand-mère de James est française, qu'elle vit encore dans la commune du Chambon-sur-Lignon, en Haute-Loire.

Estomaqué, profondément touché par la disparition de son père, James ne parvient pas à se décider : doit-il traverser l'Atlantique et aller se présenter à cette grand-mère inconnue ou bien faire fi de cette nouvelle ? Au bout d'une longue période de tergiversation, il se décide à partir à la rencontre de cette femme dont il ne sait rien.

Arrivé au Chambon, il s'installe dans un hôtel un peu... particulier : le One Toutou (nom choisi par sa tenancière en relation avec son idole, mère maquerelle à Paris lorsque les maisons closes ne l'étaient pas complètement...). Mais, lorsqu'il se rend de l'hôtel à la maison de retraite où vit sa grand-mère, Louise, il est trop tard : la vieille femme s'est éteinte brusquement, sans prévenir.

Et voilà James Nicholson nanti d'une énorme frustration et d'un maigre héritage... Quelques souvenirs qui esquissent trop brièvement la femme que fut Louise et que James ne connaîtra donc jamais.

A moins que... Parmi les objets qu'on a remis à l'Américain, un cahier, un cahier à couverture rouge. Un cahier que James ne peut se résoudre à ouvrir, comme si ce qu'il contenait ne pouvait lui être vraiment destiné. Alors, de retour au centre-ville, après avoir mangé dans le restaurant voisin de son hôtel, il a une idée : sur le papier où la serveuse, Nina, a imprimé son addition, il laisse un mot lui proposant de venir le rejoindre à 20h dans sa chambre, la 17.

Oh, pas pour ce que vous imagineriez, même si Nina a un certain charme, non... La transaction que James Nicholson va proposer à la jeune femme n'a rien de sexuel : si elle accepte de lire au visiteur le contenu du cahier, à raison d'une dizaine de pages par soirée, il lui versera à chaque fois une somme d'argent plus que convenable...

Intriguée, très curieuse de pouvoir approcher d'aussi près un Américain, comme si Nicholson était l'incarnation d'un mythe inatteignable pour le commun des mortels du Chambon, Nina accepte l'offre, sans doute avec, dans un coin de sa tête, l'idée qu'il y a là une opportunité qui ne se représentera peut-être jamais de quitter sa vie monotone dans un endroit triste à mourir...

Alors, elle entame cette lecture qui va les renvoyer 60 ans en arrière, ouvrant, sans qu'elle le sache, une véritable boite de Pandore. Car la vie de Louise, pendant ces années noires de l'Occupation, a changé de cours de façon si violente et irrémédiable, que ces révélation pourrait, malgré le temps qui a passé, bouleverser de façon tout aussi irrémédiable la vie de ses descendants. De James Nicholson, surtout.

Mais, au-delà de ce drame familial et personnel, l'arrivée dans ce (trop ?) paisible coin de France d' un Américain, parent d'une femme considérée comme irréprochable, dans un village qui est le seul de France à avoir obtenu la distinction de "Juste parmi les Nations" pour son aide apportée à plusieurs milliers de juifs fuyant la déportation, va réveiller des frustrations, des jalousies, des haines, un rejet de cet étranger venu on ne sait trop pourquoi, mais jouant les séducteurs auprès des filles du coin, Nina en tête.

Pour les garçons du village, aucun doute sur les prestations que demande James à Nina chaque soir, à commencer par Pierre, un garçon handicapé depuis un accident survenu dans son enfance. A chaque jour qui passe, son ressentiment croît pour cet Américain à qui il a à peine adressé la parole mais qui semble tourner la tête de Nina et lui donner des idées saugrenues. La séduire, la lui prendre...

Alors, pendant que James souffre un peu plus à chaque page lue, bouleversé par les révélations qu'il entend de la voix de Nina, une ambiance très tendue, violente, malsaine, s'instaure dans le village. Dans son sillage, le paisible Chambon va replonger dans un passé forcément plus trouble qu'il n'y paraît et la violence va monter telle une marée, entraînant des évènements terribles. Comme si l'horreur et la folie qui s'étaient déchaînées 60 ans plus tôt avaient resurgi du cahier rouge pour éclabousser l'époque actuelle.

J'ai choisi d'en dire peu sur ce qui se passe dans "la vie contrariée de Louise" (moins que sa quatrième de couverture, en tout cas) parce que chacune des révélations, dans la montée dramatique parallèle entre les deux époques, a été un choc, un coup de poing, une douleur. Je me suis finalement identifié à ce pauvre Nicholson qui n'imaginait pas une seconde où il avait mis les pieds...

Corinne Royer, en nous emmenant au Chambon-sur-Lignon pendant la IIème Guerre Mondiale, nous transporte dans un lieu particulier, dans un village qui a dit "non", comme le veut la formule, qui a pris des risques énormes pour protéger des juifs fuyant l'avancée des armées nazies et le zèle croissant des autorités françaises à soutenir les déportations.

Elle nous fait découvrir cet épisode méconnu, voire inconnu (et c'est vraiment dommage) de l'Histoire de France, appuyant sa création de fiction sur ce contexte réel. Tout en nous rappelant, qu'en la matière, rien n'est jamais ni tout blanc, ni tout noir et que, si le Chambon fait figure d'exception en terme de comportement, ce n'est pas pour cela que des "anicroches", des "incidents" qu'avec notre recul et notre politiquement correct, nous pourrions considérer comme impardonnables, ne se sont pas produits.

Corrine Royer n'oublie en rien l'humanité de ses personnages, une humanité qui a des revers, comme les médailles. Et, comme tout humain, aucun n'est parfait, chacun peut commettre des erreurs. Des erreurs dont les conséquences peuvent vite devenir incontrôlables. Et lorsque Louise tombe amoureuse du mauvais homme, dans l'entière sincérité de sa fin d'adolescence, pouvait-elle imaginer où cela la mènerait. Pire encore, que cet "écart de conduite" deviendrait un secret purulent comme un abcès, profondément enkysté, ne ressortant que bien longtemps après s'être constitué.

Mais Louise reste un ange, si on la compare aux énergumènes auxquels Nicholson va être confronté, sans même le vouloir, 60 ans plus tard, dans ces mêmes lieux ! Aucun n'est très finaud, reconnaissons-le, ils sont confits dans cet ennui gluant qui nous attache tous plus ou moins à notre terre natale, n'ont de perspectives d'avenir qu'un brouillard dense.

Et voilà cet "Américain" (nuance de dédain, dans ces guillemets) qui voudrait tout bouleverser par sa simple présence, donner de l'espoir (totalement factice, en tout cas, au départ) à Nina, remettre en cause la hiérarchie établie.

Le grand talent de Corinne Royer, c'est de mettre en place une montée dramatique parallèle où Louise comme Nicholson deviennent des boucs émissaires, à tort ou à raison, car, si Nicholson subit les évènements, Louise a commis une faute aux yeux de son temps. Mais, au fur et à mesure que Louise dévoile sa jeunesse terrible, Nicholson sent monter la pression... Pas forcément celle des jeunes du Chambon, d'ailleurs.

Mais, son malaise croissant met son courage à rude épreuve, au point d'hésiter à aller au bout du récit. Un malaise contagieux, puisque Nina, elle aussi, est gagnée par le doute, au point de se demander si elle doit ou non révéler les évènements relatés dans le cahier. Elle a compris que jamais Nicholson n'osera seul se plonger dans le cahier et que, pour l'épargner, elle pourrait tout à fait travestir les faits.

Et cette incapacité à ouvrir le cahier est ce qui va faire diverger les destins de Louise et de son petit-fils, jusque-là parallèle. Car, en refusant de regarder à l'intérieur (ce qui nous renvoie au titre de ce billet, à cette phrase fondamentale que sut interpréter trop tard Louise, à son grand dam) du cahier, Nicholson va éviter la confrontation au réel, trop touché déjà par la vie de sa grand-mère. Louise, elle, avait eu ce courage (insensé, avec le recul) de vouloir savoir et avait finalement regardé à l'intérieur du médaillon contenant une vérité à double tranchant.

Pour Nicholson, non seulement il ne sera pas rasséréné par l'initiative de Nina, mais il va tout de même devoir affronter le drame final, derrière le drame.

Car, "la vie contrariée de Louise", c'est ça : des drames en poupées gigognes qui viennent un peu plus meurtrir des personnages peu épargnés par les évènements. Et, par ricochet, le lecteur...

Et, pour ajouter à ce malaise de lecteur (attention, c'est tout sauf une critique pour moi, je le redis, j'apprécie  qu'un auteur me mette mal à l'aise), il y a cette ambiance globale très glauque, où le désir sexuel, omniprésent, ne semble mener qu'à la frustration et au malheur. En cela, et pardon de contredire la quatrième de couverture (oui, je m'acharne...), j'ai trouvé qu'on était loin de l'ambiance du "Liseur", car Schlink instillait le malaise une fois la relation entre les deux personnages consommée.

Pour autant, j'ai dévoré ce roman et, comme je le disais en préambule, j'y ai repensé longtemps après. Et l'histoire de Louise, si édifiante soit-elle, même si la morale, parfois, se mêle de ce qui ne la regarde pas, nous interroge forcément sur la vérité : est-elle toujours bonne à dire ? En la consignant à la fin de ces jours dans ce modeste cahier rouge, Louise nous donne sa réponse : en refoulant son secret, elle a su aller au-delà et se (re)construire pour mener une vie moins... contrariée, par la suite.


dimanche 13 mai 2012

"Si quelqu'un t'a mordu, il t'a rappelé que tu avais des dents" (proverbe peul).

Bon, certains vont me traiter de maso à la lecture de ce billet en me disant que j'ai de drôles de choix de lectures pour passer le temps à l'hôpital. Ils n'auront pas tout à fait tort... Car, le point de départ du roman dont nous allons parler, c'est la faculté de médecine de Paris et plus particulièrement l'endroit où les étudiants charcutent des cadavres encore présentables, ayant appartenu à des personnes qui ont pris la difficile décision de léguer leur corps à la science... Bon, je rassure tout le monde, je ne me renseignais pas particulièrement sur le sujet, hein ! Juste, j'étais curieux de découvrir la deuxième enquête du commissaire Nico Sirsky (dont la première avait valu à son auteur, Frédérique Molay, le prix du Quai des Orfèvres, déjà évoqué sur ce blog). Ca s'appelle "Dent pour dent", c'est publié en grand format chez Fayard et c'est un polar dans la pure tradition française, avec une idée de départ glaçante et géniale à la fois.


Couverture Dent pour dent


En cette journée paisible, à la faculté de médecine de Paris, donc, ce sont les étudiants dentistes qui ont investi les lieux pour travailler à la dissection de tête afin de maîtriser parfaitement l'anatomie si complexe de cette partie du corps humain. L'ambiance y est bon enfant, quelques vannes de très bon goût, comme savent si bien en faire les apprentis carabins, fusent ici ou là.

Jusqu'au moment où deux étudiants remarquent sur leur sujet d'étude, à la dentition pourtant apparemment parfaitement entretenue, un plombage qui leur paraît étrange, bâclé, en tout cas bizarrement réalisé. Le Dr Rieux, responsable de cette session, décide alors de faire mettre cette tête de côté et de demander à Marcel, l'homme à tout faire des lieux, celui qui gère les "stocks" de corps pour les différentes filières, de regarder ça d'un peu plus près.

A l'heure du déjeuner, une fois le calme revenu provisoirement, Marcel s'exécute. Mais, ce qu'il va découvrir a de quoi laisser pantois même un homme habitué à manipuler des cadavres depuis des décennies... Sous cet étrange plombage, qu'il a patiemment descellé, Marcel a trouvé un morceau de plastique transparent. A bien y regarder, quelque chose y est écrit : "on m'a tué".

Alors, certes, la fac de médecine est habituée, depuis des siècles, à voir ses étudiants organiser les canulars les plus originaux, mais aussi les moins politiquement correct. Mais là, les responsables de l'université ne peuvent tout de même pas décemment ignorer la possibilité qu'il ne s'agisse pas d'une mauvaise blague. Mais qu'est-ce, dans ce cas ?

Dans le doute, Elisabeth Bourdieu, responsable du service gérant les dons de corps à la faculté, prend contact avec le 36, quai des Orfèvres, car il faut l'avis de la police sur cette macabre découverte. Et c'est l'équipe du commissaire Nico Sirsky, étoile montante du "36", qui se voit confier cette étrange mission : découvrir ce qui se cache derrière ce mystérieux mot.

Et cette histoire a tout pour être une formalité, réglée en deux temps, trois mouvements, car Sirsky a d'autres chats à fouetter. A peine remis de sa "rencontre" avec un tueur en série trois mois plus tôt, il est revenu aux affaires pour préparer un important coup de filet, dont les retombées médiatiques intéressent sa hiérarchie et les politiques en place. Aucun droit à l'échec, donc...

Et puis, sur un plan plus intime, Sirsky doit gérer le départ de son épouse, qui a disparu sans laisser d'adresse, gérer la réaction de son fils adolescent à ce départ et concilier tout cela avec une nouvelle relation sentimentale de plus en plus sérieuse...

Bref, cette histoire de plombage n'a apparemment rien pour mettre le flic sur les dents (ah, ah, ah), mais, dès qu'il prend connaissance des faits et des lieux, une intuition commence à tarauder Sirsky : il flaire que, derrière cet incident peu ordinaire, se cache une affaire bien plus complexe.

Il va alors ouvrir une véritable enquête afin de retracer le parcours de cette tête et essayer de comprendre ce qui a pu pousser un homme à imaginer un tel plan pour dénoncer son propre assassinat (sans pour autant, notez-le bien, laisser d'autres indices pouvant aider à comprendre ce qui se passe...).

L'occasion pour Nico et ses hommes de pénétrer les coulisses, un tantinet morbide, de la faculté de médecine et de découvrir les mécanismes méconnus permettant de donner son corps afin, qu'une fois mort, je le précise à tout hasard, il puisse servir de terrain d'expérimentation à nos futurs docteurs, chirurgiens, dentistes, etc.

Mais, difficile aussi de remonter la piste depuis le corps jusqu'à l'être humain qu'il fut, car ces dons sont totalement anonymes et bien protégés. Mais, lorsque, enfin, ils vont réussir à mettre un nom sur cette tête, les policiers, mais aussi la famille du défunt, vont tomber des nues : Bruno Guedj était un pharmacien quadragénaire, apparemment sans histoire.

Alors, comment a-t-il pu finir ainsi ? A Sirsky et ses acolytes de reconstituer les derniers mois de la vie de cet homme qui ne leur a laissé que l'indice sans doute le plus étrange qu'il leur sera donner de voir au cours de leur carrière... Et ils ne sont pas au bout de leurs surprises, face à cette machiavélique vengeance post-mortem...

Je n'en dis pas plus, certains trouveront même peut-être que j'en ai déjà trop dit, mais ce polar est nettement découpé en deux parties : le début de cette enquête originale, avec toutes les interrogations liées à la découverte du mot, à la recherche de l'identité du mort et à la reconstitution de son passé récent. Un travail de fourmis admirablement décrit par Frédérique Molay, sans jamais nous ennuyer, alors qu'on pourrait craindre une minutie un poil rébarbative.

Et puis, une fois cette première étape achevée, la découverte d'un élément-charnière qui va mettre Sirsky et ses hommes sur la pistes d'une véritable affaire criminelle aux ramifications inattendues. A partir de là, on change de braquet : une course contre la montre est lancée et le rythme se densifie aussitôt jusqu'au dénouement. Attention, âmes sensibles, s'abstenir !

Certes, on pourra trouver le dénouement un peu en dessous de l'idée de départ de l'enquête. Mais, reconnaissons, et pour un polar, malgré tout, c'est une grosse qualité, qu'on ne voit rien venir à l'avance et qu'on est scotché par les raisons qui ont abouti à la mort de Bruno Guedj et par l'ampleur de ce qui se cache derrière cette histoire presque anecdotique à l'origine.

Moi, j'ai adhéré à cette histoire, même si je n'imaginais pas le dénouement forcément dans le domaine précis où il nous emmène au final. Et pourtant, il y a une logique assez fine dans l'enchaînement des faits et des découvertes. Une logique quasi biblique, comme le rappelle le titre du livre lui-même. Mais on pourrait y accoler une autre formule issu du Nouveau Testament, cette fois : "qui a vécu par l'épée, périra par l'épée"...

Mais surtout, j'ai lu avec "Dent pour dent" un polar tout à fait dans la tradition française du genre. On n'est pas dans le thriller anglo-saxon dopé à l'adrénaline qui fonce à toutes berzingues. On avance prudemment, avec méthode, avec des moyens modernes de recherche, c'est vrai, mais aussi avec ce flair, cette intuition et ce sens de l'intuition qui font les grands flics dans les polars français.

Et Sirsky, dès cette deuxième enquête, je trouve, est en chemin pour rejoindre le haut du panier de ses flics de roman (sous le regard bienveillant d'un Maigret, celui qui hante et hantera toujours le "36", et auquel Frédérique Molay rend hommage à plusieurs reprises).

Un rythme prudent, donc, qui va crescendo. On ne fonce pas tête baissée, on cherche d'abord à répondre à la question essentielle posée par la découverte du message dans la dent : canular ? Meurtre ? Ou autre chose encore ? Ensuite, lorsque les réponses auront été données et la piste indiquée par le message débusquée, alors, on pourra lâcher les chevaux.

Et j'aime ce côté réfléchi, qui laisse une part à l'humain dans l'enquête, à une époque où, si l'on en croit "les Experts", série(s) que je regarde par ailleurs avec plaisir, le tout-technologique prédomine.

Enfin, chapeau à Frédérique Molay pour sa précision chirurgicale (si j'ose dire !) dans les descriptions du travail quotidien des flics, dans la présentation des procédures. On est vraiment avec eux, à leurs côtés et on comprend tout ce qui fit le sel et, parfois, les difficultés du métier.

Idem, et c'est encore plus original et impressionnant, pour ce qui est de la faculté de médecine. On rentre là où tout se passe et l'on s'y croit. On découvre les coulisses, un peu macabres, de ces cours d'anatomie, de ces travaux pratiques, devrais-je dire, où l'on manipule de la chair véritable... Là encore, les procédures, le contexte est admirablement bien dessiné, tout comme les démarches à faire lorsque l'on souhaite donner son corps et ce qui se passe une fois ce don effectué. Sans voyeurisme, sans effets exagérés, on est juste dans une démarche didactique pour guider le lecteur et bien lui faire comprendre de quoi il est question.

Retenez ce nom : Frédérique Molay. Une plume encore naissante, puisqu'elle a publié 3 romans, dont deux dans la série Sirsky, mais une plume avec laquelle il faudra, je crois, compter à l'avenir dans le paysage du polar français.

vendredi 11 mai 2012

"D'heure en heure, l'apiculteur se meurt..." (Alain Bashung).

Tout d'abord, permettez-moi de parler de moi... Vous aurez constaté que ce blog a "dormi" pendant deux mois. La faute à une hospitalisation qui vient de se terminer (et ce n'est pas trop tôt !). Mais l'heure est venue de réveiller ce blog au Bois Dormant (zut, comment on embrasse un blog, au fait ?) et de reprendre un rythme de croisière ; car, si, faute de connexion internet, je n'ai pu alimenter ce blog pendant cette période, en revanche, j'ai pu lire...

Et le livre dont je vais parler maintenant a été refermé la veille au soir de mon opération... Ce qui ne m'empêche pas d'en garder un bon souvenir. D'abord, parce qu'il m'a ramené dans cette Lorraine que j'aime tant ; ensuite, parce qu'il évoque une période peu traitée, je trouve, par la littérature : les débuts de la IIIème République. Mais, nous y reviendrons. Et nous évoquerons aussi, comme le titre de ce billet l'indique, la passion d'un visionnaire, qui, plus d'un siècle avant les inquiétudes que nous connaissons, avait mis en avant l'importance pour nos existences des abeilles.

Alors, place au premier roman de Frédérique Volot, "le rucher du Père Voirnot", publié aux éditions Presses de la Cité, dans la très intéressante collection "Terres de France".


Couverture Le rucher du père Voirnot



En 1900, l'Abbé Voirnot, curé de Villers-sous-Prény, un village lorrain depuis une trentaine d'années, profite d'une après-midi estivale dans le jardin d'une famille amie, une famille qu'il a toujours connue, une famille dont il a partagé les joies et les peines, comme en cette terrible année 1877, une famille qui a partagé la passion à laquelle il a consacré le temps que lui laissait son sacerdoce : l'apiculture.

Car, l'Abbé Voirnot a toujours eu cet amour des abeilles, il leur a toujours installé des ruches, et, plus remarquable encore, il a fabriqué, en cachette ou presque, une ruche révolutionnaire, une sorte de ruche idéale, alliant les avantages des modèles existant à l'époque, et qui va rester dans l'histoire, une ruche novatrice qui existe encore de nos jours et conserve un nom lié au prêtre qui l'élabora.

Mais le roman de Frédérique Volot ne se résume pas à cette invention. Celle-ci est le clou de la vie de ce prêtre qui va épouser son temps, tout comme la famille chez qui il déjeune, d'une certaine manière. Et si ce repas et ce moment de calme et de béatitude dominicaux sont si importants, c'est parce que, en ce tournant de siècle, l'Abbé Voirnot sait qu'il ne lui reste que peu de temps à vivre. Son foie est malade, incurable... Malgré son assez jeune âge, le prêtre se sait condamné (mais un prêtre peut-il redouter ce passage ?).

Alors, dans ce jardin, le prêtre, Camille, le père de famille, retracent les évènements arrivés ces trente dernières années, depuis la fin d'une guerre perdue à plate couture, depuis l'instauration d'une nouvelle république, depuis l'ordination du prêtre... Elise, l'épouse de Camille, veille à ce qu'ils ne manquent de rien et leur fils, le petit Pierre, qui, piqué, si j'ose dire, par la passion apicole du prêtre, espère reprendre son flambeau et brûle d'emmener l'invité au fond du jardin voir ses magnifiques ruches.

Frédérique Volot entrecroise alors présent et passé et nous emmène au coeur de cette IIIème République naissante. Oh, pour ces Lorrains, bien loin de Paris, ces changements sont bien abstraits. Mais ils vont vite se faire sentir dans le quotidien de ces paisibles villageois, marqués par les stigmates de la guerre de 70, si proche et si lointaine à la fois. Pour autant, c'est la vie de village, austère parfois, rude, souvent mais heureuse, la plupart du temps, qui prédomine.

Heureuse, la plupart du temps, oui, même si le destin sait aussi frapper durement ces hommes et ces femmes à la dignité inaltérable. Comme en cette année 1877, "annus horribilis", comme on dit du côté de Buckingham Palace... Une année qui marquera, laissera son empreinte profondément dans les mémoires et les âmes. A jamais.

Cette famille, ainsi durement éprouvée, c'est celle de Camille. Origines modestes, remontant même à des émigrés polonais, sans doute parmi les premiers à être venus s'installer en Lorraine dans les premières années de ce qu'on appellera la révolution industrielle, qui remodèlera complètement la région et lui apportera prospérité et prestige (l'acier de la Tour Eiffel sortira ainsi des usines de Pompey et la famille de Camille n'y sera pas étrangère).

De l'acclimatation aux débuts de l'exode rural, des paysans sempiternellement attachés à leur terre, aux premiers étudiants, jusqu'au diplôme de médecine décroché par Camille, une première, une fierté immense, cette famille va aussi connaître toutes les mutations sociologiques que l'époque entraînera (sans que les choix soient toujours volontaires).

A chaque étape, à partir de 1871, tout cela se passe sous le regard bienveillant et consolateur de l'Abbé Voirnot qui va lier des liens d'amitié très forts avec les différentes générations. Il préside aux enterrements comme aux mariages, comme celui de Camille avec Elise, une jeune femme rencontrée à la ville, à Nancy, cet univers si différent... Lui vient de la terre, d'une famille très modeste, elle est la fille d'un grand bourgeois que l'industrialisation a enrichi.

Choc des cultures, que ce mariage, très bien raconté par Frédérique Volot, en particulier le repas de noces, qui fait naître un sourire attendri, loin de toute moquerie ou de tout mépris, mais empathique et chaleureux pour ces personnes aux yeux écarquillés devant ce luxe inconnu, jusque-là inaccessible.

Même si, personnellement, mes goûts de lecteur me poussent à préférer les romans historiques chronologiques, les nombreux allers-retours entre 1900 et les années précédentes ne m'ont pas dérangé plus que cela. J'ai dévoré ce roman, qui se lit facilement (et ce n'est pas péjoratif de dire cela), que vous soyez Lorrains ou pas, d'ailleurs.

Car, au-delà de la narration, Frédérique Volot choisit de nous emmener dans une époque que la littérature traite peu : ces années 1870-1900, où la République s'installe (dans le sang, ne l'oublions pas...), supplantant cette fois définitivement la monarchie et autres empires. Et, avec cette installation, ce sont aussi de nouveaux repères idéologiques et tout un système de valeurs différents qui apparaît et se répand.

Avec, en tête de file, un anticléricalisme de plus en plus violent et confiant en sa victoire prochaine... A l'image de Désiré Millefeuille, le maire de Villers, républicain convaincu, sa foi aussi chevillée au corps que celle, d'essence plus divine, de l'abbé. Entre eux, la relation tourne vite au vinaigre, à l'affrontement par discours ou homélie interposés. On s'entend entre chien et chat et, même si l'humour affleure peu dans cette querelle à fleurets oratoires non mouchetés, on ne peut s'empêcher de penser à Don Camillo et Peppone, dont ils seraient les homologues lorrains.

Mais l'intolérance républicaine, ses brimades, ses attaques incessantes, vont contribuer à briser un abbé à la santé fragile qui capitulera, trouvant dans l'apiculture une échappatoire salutaire, au moins provisoirement. Et, au-delà du calme retrouvé, ce choix de l'apiculture est remarquable : quelle société harmonieuse, où chaque insecte sert le bien commun de la ruche ! Un modèle que l'abbé aurait aimé voir suivi dans la société des hommes ? Sans doute, mais sa disparition prématurée lui aura au moins éviter le choc d'assister au vote de la loi de 1905...

Attention, je ne prends pas partie, je suis bien dans la perspective du roman et du personnage (qui a réellement existé), auquel on s'attache.

Mais je ne peux finir sans souligner encore le regard visionnaire que l'Abbé Voirnot porta sur ses chères abeilles. Nous avons évoqué ci-dessus l'invention d'une ruche extrêmement bien conçue, avec, pourtant, une grande simplicité et beaucoup de logique. Mais Jean-Baptiste Voirnot fut aussi l'auteur d'ouvrages de référence en matière apicole. Et, enfin, il a eu, avant bien du monde, encore aujourd'hui, l'intuition de l'importance de l'abeille dans la vie des êtres humains et des dangers que nous courrions tous en cas de disparition de cette espèce. Voilà pourquoi il a essayé de trouvé un refuge idéal pour elle.

En cela, il est un écologiste bien avant l'heure et son travail mériterait sans doute d'être reconsidéré d'un oeil neuf et attentif de nos jours, alors que les essaims sont décimés, très probablement du fait de l'activité humaine. Oui, sans abeilles, plus de pollinisation, donc une flore en danger et, nous, en bout de chaîne, bien embêtés, bien démunis...

Alors, si vous ne connaissez pas, comme moi avant cette lecture, l'Abbé Voirnot, que vous êtes sensibles à ces sujets et curieux d'Histoire, alors, ce premier roman de Frédérique Volot n'attend plus que vous.

Et comme son nouveau roman, "Pour l'honneur de Blanche", sort dans quelques jours, le 16 mai, pour être précis, voilà aussi une occasion de découvrir une romancière (vosgienne, certes, mais cet élément ne joue absolument pas dans mon choix, juré...) !



J'allais oublier !!! Merci à l'inoubliable Alain Bashung (et son parolier, Jean Fauque) pour le titre de ce billet, extrait du titre "L'apiculteur".